Rompre avec le passé
Poursuivant toujours sur le thème de la conduite chrétienne, Pierre, se fondant sur la référence qu’est Jésus, met ici en valeur le bienfait unique qu’apporte le fait pour le chrétien de souffrir dans sa chair dans le domaine de la sanctification. Après avoir développé les deux thèmes conjointement dans les chapitres précédents, la bonne conduite du chrétien et la souffrance du Christ, Pierre présente ici sa conclusion et le lien fort qui existe entre les deux sujets. La souffrance du Christ pour le péché, à laquelle le chrétien doit se préparer, a aussi donc un sens et une application, différents de ce qu’elle fut pour Lui, pour nous. Si la souffrance du Christ a été la voie imposée par Dieu pour éradiquer le péché du monde, dans le domaine de la sanctification, c’est-à-dire celui de notre conduite à la gloire de Dieu : 1 Pier 1,15-16, Pierre dit que, quelque part, elle est aussi, pour le chrétien, un élément incontournable dans le processus de délivrance complète de son emprise sur lui. La souffrance physique (ou autre) agit comme le feu qui consume en nous les mauvais désirs que la seule volonté de vivre en Christ ne suffit pas à éradiquer. Nul doute que cette théologie là n’est pas de celle que l’on préfère. Mais Dieu connaît la faiblesse de nos bonnes dispositions, le caractère récurrent de notre inconstance. Il sait que s’Il n’opère pas Lui-même en nous certaines choses douloureuses, le but qu’Il s’est proposé quant à la qualité de notre vie ne sera pas atteint. C’est pourquoi à tous les efforts auxquels Il nous invite dans la course qu’Il nous propose vers le but de la perfection : 2 Pierre 1,5 à 8 ; Philip 3,12 à 14, Dieu y ajoute une part nécessaire de douleur et de souffrance, qui peuvent être physiques, mais certainement aussi psychologiques, en vue d’un seul but : procéder en nous à la séparation complète de ce qui est de l"âme et de l’esprit : Hébr 4,11-13, séparation qui, montre Pierre, trouve ensuite sa traduction dans le comportement : v 3 à 5.
S’il y a bien, en effet, et toute la Bible le souligne dans les exigences des lois données dans l’Ancien Testament au peuple de Dieu, une chose que Dieu a en horreur, c’est bien le mélange, l’amalgame qui peut exister entre des choses qui, à l’origine, sont de nature différente. Nous voyons cette horreur de Dieu pour le mélange dès la création, par l’œuvre d’ordonnancement et de séparation qu’Il opère entre les différents éléments : terre – mer, eaux du dessus – eaux d’en bas… : Genèse 1. Puis dans le nombre infini de préceptes que le sujet concerne : Lév 19,19, comme dans la gravité de la sentence qui atteindra ceux qui, à l’inverse, pécheront par confusion : Lév 20,13 à 16. Ce que Dieu veut, c’est que chaque chose reste à sa place et que, dans la vie des chrétiens soit rétabli l’ordre et mis un terme au mélange qu’a introduit à tous les niveaux l’irruption du péché dans le monde. Aussi, dit Pierre, il est normal que, dans une certaine mesure, les incroyants trouvent étrange la vie et la conduite des chrétiens. Cette étrangeté ne fait que prouver ce que l’apôtre a dit auparavant sur la réalité de notre statut dans ce monde : le statut d’étranger : 1 Pierre 2,11.
Que Dieu me donne aujourd’hui d’apprendre et de tirer les leçons pour ma vie et l’avenir de tout ce par quoi Il tient à me faire passer pour mon bien, et le témoignage de Sa gloire dans ce monde !
Comme il l’a déjà suggéré auparavant : 3,16, Pierre rappelle ici que notre marche dans la sanctification ne concerne pas seulement la qualité de vie que le Seigneur aimerait nous voir connaître dans notre relation avec Lui. Sa portée touche au jour du jugement, jour où, dressant l’acte d’accusation qui entérinera la décision de condamnation qui frappera les impies, Dieu inclura dans les charges retenues contre eux, le témoignage de la vie sainte que nous aurons rendu, à la gloire de Dieu, devant eux. Le jugement des impies ne sera pas un jugement global mais individualisé. Dans les preuves à charge contre eux, seront intégrées toutes les occasions qui leur auront été donnés dans cette vie d’entendre l’appel de Dieu et de voir la démonstration, par la vie différente de ceux qui le professent, de la crédibilité du témoignage rendu à l’œuvre salvatrice et régénératrice du Christ. Nous sommes dans ce monde, dira Paul, une lettre de Christ : 2 Cor 3,3, mais aussi Son parfum, parfum qui, pour les uns, est une odeur de mort, pour les autres une odeur de vie : 2 Cor 2,15-16..
Pierre conclut cette partie en justifiant la raison pour laquelle, selon lui, après que le Christ ait remporté la victoire sur le péché, la mort et le diable, l’Evangile dut être annoncé aux morts. Cette annonce était la proclamation de la justice de la foi de ceux qui, par anticipation, avaient cru en Lui et avaient, de leur vivant, mené, tel Noé, une conduite conséquente de séparation avec la mentalité de leur temps. Perçus comme des étrangers dans ce monde, la justesse de leur position était ici validée par le fait que Dieu, par Christ, les déclarait comme étant Siens. Disciples du Christ avant l’heure, il était juste qu’ils entendent, au moment de son accomplissement, la Bonne nouvelle de l’espérance qui anima leur vie et conditionna leur existence entière. Cette bonne nouvelle qui sera odeur de vie pour eux, sera odeur de mort pour tous ceux qui, en leur temps, se sont montrés rebelles et impies. La Bonne Nouvelle des uns, annoncée dans le séjour des morts, sera terrible mauvaise nouvelle pour les autres.